Ces sept derniers jours sont passés comme une rafale de printemps.
Sept jours que la biographie de Marguerite Durand passe entre vos mains de lecteurices.
Instant promo
Vous pouvez vous la procurer dans 226 librairies recensées par Place des libraires et en parler avec vos libraires/médias chéri·es pour me faire venir et en discuter, c’est vraiment la partie de la sortie que j’adore (et je fais des super blagues)
Ce dont je voudrais vous parler aujourd’hui c’est de cette semaine de sortie : vous la raconter pour celleux qui n’ont pas suivi mes folles aventures sur Instagram et surtout vous la raconter depuis mes yeux d’autrice not so famous et les enjeux, pour moi, de ce type de moments.
Ce sera donc plutôt orienté partage de ressenti personnel. Si vous lisez cette infolettres pour mes recherche sur les badass flamboyantes, je vous renvoie à celles sur Eugénie Niboyet1 ou sur les manifestations contre le Code Civil :
Jour de printemps - jour de lancement (et pleins de pas dans des villes)
Les hasards du calendrier ont fait que le jour préféré pour le lancement de Marguerite Durand - Lutter par la presse soit également celui d’un colloque sur les Études littéraires de la presse régionale à Amiens où j’allais présenter mes recherches sur les initiatives féministes et médiatiques d’Eugénie Niboyet à Lyon.
Ambiance très universitaire : c’est la période de la campagne de recrutement2 alors tout le monde parle du peu de postes ouverts, des comités de sélection pour chacun, de comment ils sont ouverts ou fléchés (c’est à dire déjà pour quelqu’un·e bien identifé dans le sérail) ; on compose avec la mise en concurrence difficile à déjouer que le système nous impose. C’est un peu comme l’argent dans les milieux littéraires, on avoue du bout des lèvres où on candidate.
Si les sujets de chacune des conférences sont passionnants3, il y a, je trouve, dans le mode de partage et de diffusion de nos recherches, quelque chose de sclérosé. Chacun·e notre tour, pendant 20 minutes, nous présentons de façon très précise et verticale, nos résultats. Même si nous évoquons toustes des enjeux circulant autour d’une même problématique, le degré de technicité et de spécialisation de chacune de nos communications, les rendent difficiles d’accès. Aussi parce qu’on s’attend à une publication à la suite du colloque, ligne sur le CV qu’il est nécessaire de nourrir massivement et qui initie une écriture déjà adaptée au format écrit, nous lisons des articles universitaires en devenir les un·es à la suite des autres. Il y aurait des protocoles plus interactifs, plus horizontons et circulaires à imaginer.
Je file avec Eugénie sous le bras pour la gare. Amiens est une ville d’eau, il faisait très beau, c’était très agréable. Les Parisien·nes “exilés” sur les campus d’Amiens m’avaient effrayée quant aux soucis que la ligne Amiens-Paris rencontraient. Je peux vous dire que j’ai trotté efficacement pour m’assurer d’être dans le train le plus tôt possible.
Arrivée à Paris, dans le métro avec O. qui m’avait livré du moelleux au chocolat à la descente du TER (allié++++++), la fatigue tombe un peu. Je suis dans la bonne ville, à la bonne heure, la tension universitaire se relâche. C’est parti pour Marguerite.
À la BMD, je retrouve ma soeur, venue depuis ses montagnes pour le boulot, cette fois le hasard du calendrier est merveilleux. J’entre dans la bibliothèque avec une excitation électrique. Qui s’apaise dès les premiers pas. L’accueil souriant et chaleureux et joyeux des bibliothécaires me fait un bien fou. Leur validation de mon travail m’est très importante, me met tout à fait en confiance.
Elles ont soutenu la phase de recherche avec une grande générosité, elles soutiennent le lancement de la même manière : une exposition sur Marguerite Durand a été pensée pour l’occasion. Des archives papier, des objets, des numéros de La Fronde, des photos… Cet espace, ces documents, ces personnes me sont devenues familières. En les voyant, je me rends compte qu’elles m’ont manquées, que j’aurai voulu y écrire aussi, et faire mes pauses café dans le bureau, et leur faire lire des bouts. Être physiquement entourée de leur confiance.
Le fait de n’être pas de Paris est un enjeu lorsqu’on fait de la recherche et/ou qu’on écrit, un peu comme le fait d’avoir des horaires de vie de famille dans une start-up. La logistique compléxifie la fréquence. Vous passez nécessairement à côté de choses, les discussions informelles, les rencontres fortuites dans l’entre-soi. On pense moins à vous, vous êtes moins là. Il y a en plus, dans la culture, une hiérarchisation pas vraiment avouable, entre Paris et “la province”. C’est ok de partir vivre à la campagne, c’est stylé, mais en venir et choisir d’y rester vous donne un petit côté plouc, mignon, marrant et humble, qui de façon certainement peu consciente, joue lorsqu’il s’agit de vous inviter4, de vous payer. On vous pense loin.
Le 3e étage de la médiathèque Melville, l’étage consacré de Marguerite Durand, s’est rempli : la famille en force, des amix coeur, des féministes enthousiastes, des universitaires… Tout ce beau monde s’est assis devant Sophie Béral, Marilou Clair et moi. Carole Chabut a introduit la discussion : la bibliothèque et son histoire, la présence de trois générations de conservatrices (autant vous dire que j’étais impressionnée, l’une d’entre elle avait connu les locaux dans lesquels Marguerite Durand a fondé la bibliothèque).
Les questions de Sophie et Marilou m’ont permis de parler d’écriture, de rapport à la recherche, des archives, du lien si particulier développé avec Marguerite Durand. J’ai dit la discrétion de ma narration, les interrogations féministes du dévoilement de l’intimité, l’importance de la transmission. Le public a posé des questions précises de recherche : la présence de la loi laïcité dans La Fronde, les organisations féministes de la Belle-Époque…
J’ai ensuite signé de nombreux livres en discutant avec les gens, enthousiastes et ravis de la présentation.
Puis : dîner heureux, vin fort, métro rapide, mauvais sommeil électrique, train pour la Normandie.
21 mars - une rencontre comme à la maison
Marguerite Durand recevait souvent depuis son lit. Enfin, c’est ce que je crois comprendre quand elle notait dans ses agendas, “alitée toute la journée” et “reçu Bidule, Chouette et Machin”. À un moment, je me suis dit que je devrais faire ça, organiser la rencontre depuis mon lit. Est-ce que c’était dans la torpeur après une longue sieste ? Peut-être.
La rencontre du 21, le jour de la sortie officielle avait donc lieu à Caen, à la Nouvelle Librairie Guillaume, autre acteur du livre dont le soutien est fondamental dans mon activité. C’est là que j’ai fait mes deux lancements, que je propose d’animer des rencontres, que j’achète tous mes livres. Les libraires m’y conseillent, me lisent, me guident aussi depuis leur expertise de la distribution et du marché.
La librairie est pleine. 40 personnes sûrement. Combien de visages ne connais-je pas ? Très peu. J’ai vraiment l’impression de faire une présentation à mes amiX, dans une soirée militante par exemple. Les questions de Léa Desquesnes nous emmènent vers une discussion différente de la veille. On lit quelques extraits du textes. Elle m’interroge sur l’aspect très pratique de la recherche en archives : comment ça se passe concrètement ? On parle stratégies de luttes féministes, syndicats et convergences. On parle de renouvellement des codes de l’écriture biographique. Je fais des dédicaces aux amiX qui traînent dans la librairie.
Et on reste à une dizaine. On dresse des tables avec les libraires, on mange du libanais délicieux, on se sert des verres et qu’est-ce qu’on discute ! On refait le monde du livre : on est les acteurices du bout de chaîne, auteurice/libraire (pas les patrons), on devrait mutualiser, se fédérer, faire des trucs pour défendre nos intérêts. J’ai vraiment la sensation d’une complicité, d’un partenariat solide et conscient.
La suite ?
Une semaine plus tard, l’agenda commence à se remplir - rencontres à la mer, salons du livre, rencontre à la ville. Je n’ai pour le moment pas de média5. C’est une sensation un peu étrange que la retombée de cette grande intensité. J’ai fini un puzzle niveau avancé+, je lance le potager, je trépigne d’aller me baigner. J’ai du mal à lire et à écrire. Je fais des dossiers de maîtresse de conférence.
Mes attentes sont de toute évidence différentes de quand j’ai sorti Corset de Papier : c’était un essai précis, personne n’avait entendu parlé de moi, j’étais très contente qu’il soit un peu lu et remarqué. J’ai l’attente/l’espoir/l’ambition (je voudrais l’écrire en tout petit celui)là) que la biographie de Marguerite Durand puisse circuler de façon plus large encore tant elle est à la croisée de l’histoire des médias, du féminisme et de la flamboyance romanesque, tant j’ai travaillé. Je pensais que les rencontres en librairies seraient plus rapidement plus nombreuses et les recensions médias déjà un peu là. J’active des leviers pour rendre mon travail visible, distinguable parmi les nombreuses sorties. Pas la même maison, trois ans plus tard : le marché - puisque c’est bien de ça dont il s’agit - a bougé, l’actualité est étouffante. Et un peu de calme après cet hiver épuisant, avant une rentrée nécessairement en mobilité, ce n’est pas une si mauvaise chose.
Point agenda :
19 avril : rencontre les pieds dans le sable à Luc sur mer, au Garage Hermétique à 18h
24/25 mai : je serai au Salon du Livre Époque, à Caen, avec la Librairie Guillaume
14/15 juin : je serai au Salon Les Échappées du livre à Avranche
5/6 juillet : je serai au Salon du Roman Historique à Levallois-Perret (oui, je sais, j’y vais aussi pour voir)
Sont en train de se caler des rencontres en librairies à : Nantes avec Popol Média, Quimperlé (chez Divergences les superbes, obvi), peut-être Lorient, Toulouse et Paris.
Au plaisir de vous croiser dans vos librairies indépendantes préférées :
Je ferai un billet là-dessus parce que c’est une réalité peu imaginable quand on ne circule pas dans ce milieu
J’ai été très sensible à l’étude de Hortense Delair – « Quand Le Réveil du Nord publie Les Crimes de Lille : l’inscription du feuilleton dans la presse et l’histoire locales » : comment la presse régionale évoque notamment les crimes et violences sexuelles.
Exemple logistique : je n’ai pas signé les SP envoyés, j’ai signé des cartons que l’attachée de presse m’a transmis par la poste et que j’ai renvoyés. Ça a pris du temps, les SP sont partis plus tard, et c’est quand même pas tout à fait la même chose de signer son livre pour quelqu’un·e qu’on aime bien.
J’ai eu une longue discussion avec Marie Kirschen pour le prochain numéro de La Déferlante ; j’ai refusé un entretien à Marianne.